Khatgal – Lac Khuvsgol

Le lac Khuvsgol est le 2ème plus grand de Mongolie et le plus profond avec un fond maximal à 262 m. Il communique par un réseau souterrain avec le lac Baïkal. Il est gelé en moyenne de janvier à avril. Tous les 1ers week end de mars, un festival des glaces est organisé dessus. Ayant trouvé cette info lors de mes préparations, je m’étais organisé pour pouvoir y être. Il y avait cependant un risque que la date soit décalée, en fonction de l’épaisseur de la glace donc je n’étais pas sûr que ce festival se déroulerai à la date prévue, soit du 2 au 4 mars.

Accès à Khatgal depuis Oulan Baatar

Plusieurs solutions se présentaient pour assister à cette fête : soit loger à Mörön, la principale ville de la région à une centaine de km du lac, soit loger à Khatgal, village au nord du lac. Il y avait des transports (mini van ou taxi) tous les jours entre les deux localités avec une unique route. J’ai réussi à trouver un Airbnb à Khatgal, ce qui au final n’était pas plus mal. Pour accéder à ce village (enfin, c’était plus qu’un village, plutôt une petite ville), il fallait passer obligatoirement par Mörön. J’ai pris un bus de nuit d’Oulan Baatar, avec un temps de trajet théorique de 11 h 30. Mon départ était prévu à 18h, je suis arrivé à Dragon station, la gare routière à l’ouest d’Oulan Baatar, vers 15h. Très en avance donc. Je me suis un peu baladé aux alentours mais il n’y avait pas grand chose à part un petit centre commercial. Dans la salle d’attente, il y avait des écrans avec  les n° des bus et leur statut. Ne voulant pas rater mon départ, je guettais régulièrement l’affichage mais mon bus n’apparaissait pas. Vers 17h, j’ai fait un tour sur le parking et examiné les bus, histoire de repérer le mien. Toujours rien, il n’était pas sur le parking et n’était toujours pas affiché. A 18 h, rien non plus. J’ai attendu 5 mn, 10 mn et  finalement au bout d’une demi heure, le bus a été affiché “parti”. Ne comprenant rien, je suis retourné sur le parking sans rien trouver. Au bout d’un moment, j’ai remarqué deux autres bus, assez éloigné de la gares, sur un autre parking. Je suis allé les voir et bingo ! C’était le lieu de départ pour Mörön. Mais j’avais raté mon bus. Il était parti à l’heure. Du coup, j’ai montré mon ticket à un des hommes qui contrôlaient les billets et je lui ai expliqué mon problème. Il m’a accompagné à la gare et au comptoir pour changer mon billet pour le bus suivant. Mais surprise : la femme m’a demandé de payer à nouveau. Je leur ai expliqué que j’étais présent mais qu’à cause du problème d’affichage, je n’ai pu voir mon bus au départ. Rien à faire. Le mec m’a même dit “mais il ne faut pas prendre en compte les écrans !”. J’étais à deux doigts de péter un câble, en mode “Votre affichage n’est pas fiable, j’ai raté mon bus à cause de ça et vous me demandez de repayer un ticket ? Vous vous foutez de moi ?”.  J’ai refusé de payer à nouveau mais ils étaient en position de force. Ce n’était pas eux que ça emmerdait. Bref, à force de discussion, ils ne m’ont fait payé “que” les frais de changements de ticket, 5400 T quand même, ce qui fait que j’avais eu mon ticket pour 41 500 T au lieu de 36 000 T. Ce n’était pas énorme comme tarif, 5 400 T, ça faisait 1,90 € mais c’était pour le principe. Quand j’ai fini par enfin accepter de payer les frais supplémentaires, le chauffeur et la femme au comptoir se sont ouvertement foutu de ma gueule avec un “Tourist !” très sarcastique. Bref, j’ai balancé les billets sur le comptoir en mode “Tenez, bandes d’enfoirés !” et j’ai rejoint le bon bus. Donc à retenir : à Dragon Station, ne pas prendre en compte les écrans de départ, il faut aller directement sur le parking et aux alentours, les bus se garant un peu n’importe où. J’ai appris à mon retour que les n° de bus sur les tickets ne correspondaient pas aux n° sur leur panneaux de destination sur leur pare brise mais à leur plaque d’immatriculation. Donc pour trouver son bus, il fallait observer les immatriculation, pas les destinations. Ce qui en soi n’était pas con.

Avec ces histoires, je suis finalement parti à 20 h30 au lieu de 18 h. Le contrôleur du bus était assez sympa en revanche. En voyant que j’étais un étranger, il a un peu discuté avec moi. On a eu une pause vers 22 h, à un restaurant. J’avais envie d’uriner depuis des heures donc à peine descendu, je me suis précipité vers les 1ères toilettes que j’avais vu, sur le côté du parking. C’était des toilettes payantes à 100 T. Mais là, vu l’urgence, je m’en foutais.  Peu après, j’ai vu qu’il y avait aussi des WC au restau, gratuits… Je n’ai pas mangé (j’avais déjà grignoté avant), en revanche il y avait du thé gratuit à volonté. Le reste du voyage s’est passé sans problème. Le bus secouait beaucoup et il était difficile de dormir. Mon sac était trop gros pour le porte bagage au dessus. Du coup, je l’avais à mes pieds et je n’avais plus d’espace pour les jambes. L’intérieur était très bien chauffé mais les vitres étaient gelées par le froid extérieur. Donc il ne fallait surtout pas s’y appuyer. Je suis arrivé à Mörön à 9 h 50. J’avais contacté la veille l’homme, qui s’appelait Nyamsvren (mais on l’appelait Nyam), qui gérait le Airbnb pour lui prévenir de mon arrivée. Il s’était arrangé pour m’obtenir un taxi à un tarif avantageux pour environ 20 dollars soit environs 55 000 T au lieu de 80 000 T. Avec mon problème de bus, je l’avais aussi prévenu de mon changement d’horaire d’arrivée. A ma descente de bus, 4 à 5 personnes voulaient m’emmener en taxi. J’étais un peu méfiant et je leur ai dit qu’un taxi m’attendait en principe mais je ne savais pas lequel. Du coup, un des hommes, qui ne parlait pas anglais, a directement appelé Nyam pour qu’il confirme que c’était lui et je l’ai suivi. Après qu’il eut fait une petite pause dans Mörön pour s’acheter un coca (se vider aussi dans un coin isolé), on est parti pour environ 1 heure et demi de route tranquille. Par certains côtés, les collines m’avaient rappelé certains coins du Gers (en enlevant les moutons). Avec le peu de sommeil que j’avais eu, j’ai un peu somnolé durant le trajet.  Khatgal était situé dans le parc national de Hövsgöl et j’avais lu que l’accès était payant. Mais à l’entrée, il n’y avait personne et on est passé sans s’arrêter. Peut être que l’entrée était gratuite en hiver, je ne sais pas. Nous sommes arrivés au airbnb en fin de matinée. C’était une petite maison en dur avec un petit jardin, un husky avec qui je jouais de temps en temps quand je sortais fumer mais qui s’éloignait dès que j’allumais ma clope et qui était tout le temps dehors avec une niche (très résistante la bêbête avec les – 30, – 40°C la nuit) et des toilettes dans une petite cabane au fond du jardin (qui se composait d’un simple trou d’environ 3 – 4 mètres de profondeur avec des planches pour éviter de tomber). Il y avait aussi des yourtes dans le jardin qu’ils louaient également. Nous avons été accueilli par la maitresse de maison, le chauffeur et moi, avec du lait de jument dilué chaud ainsi que des biscuits. Après quelques minutes de discussion entre elle et le chauffeur, elle m’a annoncé le tarif de la course : 80 000 T. Bon, je ne me suis pas énervé. Mais je lui montré les échanges que j’avais eu avec son mari concernant le prix de la course et le chauffeur a fini par accepter les 50 000 T. Son excuse était que j’étais seul donc tarif plein pot, ce qui était parfaitement ridicule car le prix ne dépendait aucunement du nombre de passager mais uniquement de la longueur du trajet. D’ailleurs, c’est un truc à savoir si tu voyages à plusieurs : il vaut mieux parfois prendre un taxi si vous êtes au moins 4, ça revient moins cher qu’un transport en commun en mini van qui facture par personne.

Khatgal

Après une bonne heure de repos, je suis allé me promener aux alentours, notamment sur la colline visible de la maison et qui surplombait le lac, sur les conseils de la femme (que j’appellerai Nana). C’était une promenade assez sympa, la montée n’était pas des plus faciles avec la neige verglacée mais la vue valait le coup. Je suis descendu ensuite sur le lac et je me suis perdu. Impossible de retrouver le chemin de la maison. L’adresse que j’avais indiquait le centre ville sur Maps.me ou Google map. A force de tourner, le soir tombait ainsi que le froid, assez rapidement. Et contrairement à Oulan Bator, il faisait facile du – 30 °C la nuit… J’ai fini par contacter Nyam. Par sms interposés, il a essayé de me guider et finalement, il est venu me chercher en voiture le long de la route principale. Pour ma défense, il n’y avait ni de nom de rue ni de n° de maison à Khatgal donc les adresses étaient un peu limitées. Donc déjà qu’avec des noms de rue, j’étais capable de me perdre alors sans rien… Je supposais que le facteur devait connaître tous les habitants pour acheminer le courrier… Je suis enfin revenu à la maison vers 19 h. Pour la suite, j’avais mis un repère gps sur maps.me, histoire d’éviter la même galère.

 

J’ai donc fait la connaissance de toute la famille le soir. Il y avait donc Nyam, le père, Nana (qui n’est pas son vrai prénom, pour rappel) et leur deux enfants, un garçon d’environ 6 – 8 ans et une fille d’environ 10 -12 ans. Ils avaient aussi deux autres enfants, beaucoup plus âgés mais un garçon était à Oulan Baatar et une fille à Taïwan. Pour info, la petite a été la seule de toute les personnes que j’ai pu rencontrer pendant le tour du monde à reconnaître mes origines coréennes. Du coup, elle me montrait de temps en temps des vidéos de Kpop qu’elle trouvait sur Youtube pour me faire plaisir. Le garçon était fan d’échecs et tous les soirs après manger, on se faisait quelques parties. Pour son âge, il ne se débrouillait pas trop mal. Un jeu un peu trop précipité dans l’ensemble mais il avait une vision globale du jeu assez correcte. Il était un peu mauvais perdant aussi. Du coup, j’évitais de le battre trop rapidement si je voulais gagner. La plupart du temps, je lui laissais la victoire mais je faisais en sorte que ça ne soit pas facile en lui tendant des pièges pour le faire progresser. On jouait ensemble avec la petite de temps en temps aussi, notamment un jeu avec des osselets de moutons qui ressemblait beaucoup au jeu des petits chevaux (d’ailleurs, après quelques recherches, j’ai appris que ça s’appelait la course des chevaux). Nyam et Nana était très gentils également. Durant le festival par exemple, il nous emmenait en voiture pour traverser le lac. Nous car nous étions plusieurs “invités” dans la maison. Nana était très prévenante avec moi. Il faut dire que j’avais attrapé un rhume le lendemain de mon arrivée. Avec ma perte de la veille et mon physique gringalet, j’étais un peu considéré comme le petit d’un groupe qu’il fallait surveiller. Du coup, elle m’avait prêté un de leurs manteaux, beaucoup plus chaud que ma veste. Tellement que je n’avais pas besoin de pull en dessous, je restais en T-shirt malgré la température négative. D’ailleurs, au début, je le portait mal, très serré comme une veste. La sœur de Nyam qui passait de temps en temps m’a ensuite montré comment ça se portait : le haut devait être très lâche, pour laisser un maximum d’air au niveau de la poitrine. Un peu comme si j’avais une poitrine virtuelle de bonnet F. Avec la ceinture, on maintenait la forme du haut. Cela permettait aussi d’avoir un espace pour mettre portefeuille ou autres affaires. De cette manière, le manteau arrivait au niveau des jambes. Les locaux avaient en plus de longues bottes donc ils étaient intégralement protégés du froid sans devoir se trimballer les multicouches comme nous autres, touristes. Donc quand ils entraient dans les maisons ou les yourtes surchauffées, ils n’avaient juste qu’à enlever leur manteau. Nous, il fallait enlever la veste, la doudoune et le pull. Un joyeux bordel. (Dans le contexte d’un tour du monde et d’un voyage en mode “léger”, le système multicouche était tout de même le mieux en terme d’encombrement et poids.). De temps en temps, Nana m’invitait aussi à partager leur repas du soir ou le petit déjeuner, qui n’étaient pas compris dans le prix de mon hébergement et alors que j’avais ma propre nourriture. Elle m’avait montré également une sorte de divination par les os de moutons. Alors, attention, ce n’était pas des gros os mais des petits de la hanche, qu’ils appelaient shagai. Ils s’en servaient pour beaucoup de jeux. Celui avec les enfants était constitué de plusieurs dizaines de shagai par exemple. Les shagai comprenaient quatre faces correspondant à 4 animaux : le cheval, le mouton, le chameau et la chèvre. En lançant 4 os, il se formait une combinaison qui était l’horoscope de la journée. Il y avait une feuille avec les correspondances traduite en anglais qui me permettaient de comprendre. La 1ère fois que je l’avais fait, j’avais eu une divination très négative.  En gros, ça disais : “si vous sortez de chez vous, vous allez morfler”. J’étais content : ma poisse ne m’avait pas quitté ! Bon, je suis quand même sorti ce jour là et il ne m’est rien arrivé de négatif (le rhume, je l’avais déjà).

Il y avait un italien qui est arrivé le soir de mon arrivée. Il était moniteur de plongée à Chypre en été et en hiver, il voyageait en solo en Asie et Moyen Orient. Il avait été assez souvent en Afghanistan par exemple. Il avait prévu d’aller ensuite vers l’ouest de la Mongolie. Très sympa. Une Australienne d’origine indienne qui vivait au Chili est arrivée ensuite vers minuit. Sympathique aussi mais à sa manière. C’était un bordel vivant. Dès son arrivée, le volume audio avait augmenté de plusieurs dizaines de décibels. D’ailleurs, Nana m’avait fait la remarque un peu plus tard en me disant que quand elle était là, on ne pouvait pas la louper tellement elle faisait du bruit. Faut dire que ça contrastait avec l’Italien et moi qui restions assez calmes. Elle parlait beaucoup, fort, était très passionnée et avait une appétence pour le mystique, le chakra et autres méthodes de bien être. Une de ses théories était que l’état d’esprit se transmettait par l’ADN, que par exemple, si les parents étaient bons, les enfants l’étaient aussi obligatoirement. Pour elle, l’ADN gardait en mémoire les sentiments et les expériences des parents. En tant que biologiste moléculaire (et enfant adopté), j’étais légèrement en désaccord avec ça. Pour moi, hors pathologie, le comportement n’est pas transmis mais est fonction de l’environnement et de l’éducation donnée par les parents. Un enfant qui vit en zone de guerre ou un enfant qui vit en paix dans une famille riche n’auront pas du tout le même sens des valeurs par exemple. Elle venait du nord du lac et l’avait traversé en voiture. Le voyage n’avait pas été sans danger à priori. Elle racontait que plusieurs fois le chauffeur s’arrêtait pour sonder la glace.  Petite précision, il n’y avait pas de route après Khatgal. Pour continuer plus au nord, il fallait obligatoirement passer par le lac. En été, il y avait des lignes régulières de bateaux et en hiver, voitures ou mini van.

La 1ère nuit a été très fraîche. On dormait tous à l’étage, la famille dans une chambre, l’Australienne dans une autre (qui était habituellement celle de la petite) et l’Italien et moi dans une 3ème. Il y avait une poêle en fonte à bois qui chauffait fort mais elle s’éteignait au cours de la nuit, faute de bois. Il y en avait aussi une au rez de chaussée qui servait à la fois pour le chauffage et la cuisine. Je dormais en collant – T shirt en laine et bonnet sous deux couches de couvertures épaisses mais j’ai tout de même eu froid et attrapé un rhume. J’en ai parlé à Nana le lendemain matin, pas en me plaignant mais juste en lui expliquant que je comprenais pas comment j’avais pu avoir froid. Les autres aussi s’étaient gelés. Du coup pour les nuits suivantes, ils nous ont prêté des énormes duvets épais  (qui venaient d’Angleterre) qui pesaient une tonne et ils avait également demandé à un ami de veiller la nuit pour recharger la poêle en bois. Les autres nuits allaient mieux ensuite. L’Australienne m’avait donné quelques médicaments pour calmer le rhume qui m’ont aidé à tenir la journée mais le lendemain, je suis allé à la pharmacie du coin. Contrairement à Oulan Baatar, je n’ai pas eu de problèmes à expliquer. A ma tête, la pharmacienne avait tout de suite compris mon soucis. Petite info : ils ne vendaient pas les boîtes entières. La pharmacienne avait coupé aux ciseaux une plaquette pour me donner juste la quantité nécessaire. Pas de gâchis. Ils ont été très efficaces, 3 jours plus tard, c’était fini. Mais j’avais vidé mes réserves de mouchoirs et j’ai du en racheter à Mörön. D’ailleurs la caissière avait été assez surprise, j’avais pris un lot de dix paquets, elle n’était pas habituée.

Un groupe de Mongols était arrivé la 2ème journée. Ils étaient en études démographiques et faisaient des relevés dans la région sur le développement des enfants  chez les familles nomades. Ils dormaient dans les yourtes du jardin qui leur servaient de base. On a passé toute la soirée ensemble avec eux, la famille, l’Italien et l’Australienne. Ils avaient apportés de la bière et des chips et ça a été une des soirées les plus agréables de mon voyage, malgré une panne de courant qui nous a obligé à passer en mode lampe frontale et torche. J’avais aussi sympathisé avec une des femmes du groupe qui parlait parfaitement l’anglais. (Elle m’avait passé son n° mais écrit au feutre sur une surface plastique, ça n’avait pas tenu longtemps). L’Australienne est repartie le lendemain et l’Italien le surlendemain. Il a été remplacé par deux Indiens. Des fous furieux. Déjà, ils avaient des valises de plus de 20 kg chacun mais en plus, ils avaient prévu d’aller passer une semaine plus au nord en traversant le lac à vélo. Des malades. J’étais resté en contact avec eux et bien plus tard, ils m’ont appris qu’ils avaient dû faire demi tour. Ils avaient été pris dans une tempête au milieu du lac et il était impossible pour eux de continuer. Ils avaient adoré Bibou et le soir de leur arrivée, on s’était fait plusieurs parties de cartes avec la petite. Cette dernière était aussi très curieuse de mon casque. Quand je lui ai fait essayer, elle a été impressionnée par l’atténuation du bruit ambiant qu’il produisait et ça lui avait donné une idée de jeu. Avec le casque aux oreilles et la musique en marche, on devait deviner un mot en anglais que les autres disaient. Pas aussi simple que ça en allait l’air.

Pour revenir sur la vie quotidienne, il n’y avait pas non plus d’eau courante. L’eau était stockée dans des grosses bonbonnes de 100 L dans lesquelles on puisait avec une casserole. Il y avait un petit évier dans la pièce principale avec un bidon de 2 – 3 L dessus qui servait pour tout : vaisselle, lessive, salle de bain. Donc on se lavait devant tout le monde, YOLO. Il y avait un seau en dessous qui recueillait l’eau sale qu’on vidait ensuite dehors. Évidemment, j’avais trouvé le moyen d’y faire tomber mes baguettes en faisant la vaisselle… Pour le lavage de cheveux, on se servait de la casserole au dessus d’une bassine. Nyam nous a expliqué qu’il y avait un projet de mettre l’eau courante avec des égouts dans toute la ville mais une bonne partie de la population était contre. Les écoulements auraient finis dans le lac sans être traités et le risque de pollution était énorme. Ils n’en voulaient pas, le lac ayant une eau très pure. Sans compter que pour une bonne partie d’entre eux, il était également sacré. J’ai passé 3 jours complets au sein de cette famille et je me ménageais une partie de la journée ou soirée seul pour faire mes backup de photos et tenir mon journal de voyage. Quand ils étaient là, les enfants respectaient ces moments et attendaient patiemment que j’eusse fini pour venir me voir. Oui, j’avais passé une bonne partie (pas la majorité non plus) de ma présence dans la maison avec les enfants. Ils m’aimaient bien.

Le festival des glaces

Le festival des glaces commençait le 2 mars mais les préparatifs étaient déjà entamés la veille. On était allé jeter un coup d’œil. Nyam nous y avait emmenés en voiture et nous sommes rentrés plus tard à pied. Les tailleurs prélevaient la glace du lac et construisaient les murs et les sculptures à la tronçonneuse. Il y avait également des traineaux à chevaux qu’on a pu tester avec l’Australienne, ils proposaient des tours. (Je n’ai pas pu prendre de photos, j’avais ni l’angle ni la possibilité d’en prendre. J’essayais de ne pas me casser la figure du traineau). On a ensuite rejoint l’Italien dans une yourte où on a bu du lait de jument dilué chaud et mangé des espèces de galettes frites et fourrées à la viande de mouton. Très chaudes et très grasses. Très abordables aussi : 1 000 T pièce soit 0,35 €… L’italien étant végétarien, il n’en a pas pris. Ni l’Australienne qui était végan. Elle avait cependant réussi à négocier d’en faire à sa sauce avec une bouilli de pomme de terre. Contrairement à d’autres cons  que j’ai pu connaître, elle respectait ceux qui mangeaient de la viande et à aucun moment elle n’avait essayé de me convaincre du véganisme ni  à me faire la morale. Elle m’avait fait goûter un soir une espèce de mélange à base de graines qu’elle mangeait mais je n’avais pas trouvé ça très bon. Assez fade dans l’ensemble et un peu étouffant. Pour les végétariens et les végans, la Mongolie est assez compliquée niveau nourriture. Une grande partie étant éleveurs, une des bases de l’alimentation contient du mouton ou du renne.  Après avoir passé un bon moment au chaud, nous somme repartis, juste à temps pour assister à une course de traineaux. Il y avait une petite île et le circuit faisait deux fois son tour.

 

Le lendemain, l’Australienne devant repartir à 9 h, nous sommes retournés au festival assez tôt le matin, vers 7h. La femme du groupe d’étude était venue aussi.  Elle repartait également dans la matinée avec son groupe mais elle voulait jeter un coup d’œil sur le festival aussi. En comptant Niam et un de ses amis, on était entassés à 6 dans la voiture. On se tenait chaud. Malheureusement, le festival n’avait pas encore commencé et les préparatifs n’étaient pas encore terminés. Il faisait – 20°C avec un petit vent, ça piquait un peu. Bref, les filles sont reparties assez rapidement et  j’ai passé le reste de la journée au festival avec l’Italien. J’y suis retourné le lendemain après midi avec les Indiens (l’Italien était reparti). On a eu beaucoup de chance, il faisait très beau. En fait, il y a très peu de précipitations en Mongolie. La neige tombe en très grosse quantité au début de l’hiver et se maintient ensuite avec le froid. Mais le 2ème jour du festival, il faisait limite trop chaud : + 5°C !

Le festival consistait en une espèce de kermesse géante avec différentes activités proposées : lutte sumo, volley ball (sur la glace, voui!), patins à glace, toboggan, jeux de fléchettes, tir à l’arc et d’autres jeux mongols que je ne connaissais pas. Il y avait également un marché un peu à l’écart où on pouvait trouver un peu de tout et sur la rive, des yourtes “restaurants”. Il y avait un programme d’affiché près de l’entrée mais les horaires étaient à la louche. Au début, on avait essayé de suivre l’heure mais on s’est vite rendu compte qu’au final, le mieux était de suivre les mouvements de foule. Il y avait aussi des coins pour les enfants où des activités leur étaient proposés. Étant un gros évènement local, il y avait énormément de monde. Pour une fois, ça ne m’avait pas dérangé. Cela m’avait permis d’observer de plus près la population locale. A Oulan Baatar, ce n’était pas trop possible, trop urbanisé et à Khatgal, il n’y avait pas suffisamment de monde dans les rues. J’en avais croisé dans les supérettes mais très peu. Du coup, là j’étais content. En plus, avec le manteau prêté par Nana, on me prenait aussi pour un local. Donc ils ne prêtaient pas trop d’attention sur moi. Il y a même eu un marchand au marché qui m’a pris  pour un guide qui venait en reconnaissance en me demandant combien de personnes il y aurait dans mon groupe. Il y avait aussi quelques touristes, en plus de nous. Mais dans l’ensemble, pas beaucoup et surtout… des Français. Pas de problèmes d’identifications, même à une dizaine de mètres d’eux, je savais que ça en était. En général, on n’est pas très discrets…

Il y avait également un mini bâtiment en glace où était exposée des tableaux ainsi qu’un stand de thé gratuit un peu plus loin. J’ai également vu un défilé de costume traditionnel, version adultes et version enfants (non, rien à voir avec l’érotisme), avec remise de prix et un concours que je n’ai pas très bien compris, il s’agissait de casser un os en le jetant à terre mais d’une certaine manière. On a assisté également une 2ème course de traineaux, avec beaucoup plus de participants que la veille et de public aussi. C’était un bordel au départ avec les voitures de polices qui bloquaient la circulation des autres voitures et les policiers à pied qui essayaient de maintenir la foule hors du chemin des traineaux. Mais c’était aussi très vivant et drôle à vivre. Pour prendre en photos discrètement les locaux, j’utilisais une technique qu’un paparazzi m’avait appris au Québec : petite ouverture pour avoir une grande profondeur de champ et une petite focale pour avoir le plus grand plan possible. Et avec ça, il suffisait de viser dans la direction générale du sujet et recadrer ensuite en post prod. Je portais mon appareil à hauteur de la taille, légèrement sur le côté qui me permettait de prendre discrètement mes photos. Dans certaines circonstances, je bloquais la focale sur une distance de 2 mètres. Sur la petite île, il y avait également un peu d’activité. Notamment un mongol qui avait amené deux rennes. L’Italien avait essayé de les prendre en photo mais l’homme se mettait systématiquement devant pour l’en empêcher. De mon côté, j’étais un peu plus discret (malgré le reflex) et j’ai pu en prendre sans qu’il s’en rende compte. Nyam et Nana nous avaient aussi mis en garde des nombreux pickpockets aux festivals. Du coup, on avait laissés nos passeports et nos portefeuilles sous la garde de Nana et en gardant uniquement un peu de liquide sur nous. Pour ma part, j’avais très peu de risques : le manteau n’avait pas de poches et me recouvrait pratiquement jusqu’à la moitié des jambes donc mes poches de pantalon étaient inaccessibles. Quand à ma sacoche, vu qu’il y avait mon matériel photo, bonne chance pour y glisser la main.

 

Retour à Oulan Baatar

Je suis reparti le 4 mars, en prenant un mini van. La veille, j’avais demandé à Nyam où se trouvait l’arrêt. Il a passé un coup de fil et c’était réglé. Le mini van passait directement à la maison. En fait, il n’y avait pas vraiment d’arrêt. Le van passait dans Khatgal et s’arrêtait à devant différentes maisons pour embarquer les passagers. On a dû faire près d’une heure et demi de détours (avec un passage sur le lac) avant de partir réellement.  Je suis arrivé à Mörön vers 14 h, à environ 20 mn de marche de la gare routière. Nyam m’avait écrit sur un papier toutes les informations pour acheter mon ticket. Je n’ai eu qu’à donner le papier au guichet et c’était réglé. Un bus partait à 15 h et le chauffeur m’avait proposé de le prendre. Mais avec les quasi 12 h de transport, ça me faisait arriver vers 3 h du matin à Oulan Baatar. Je n’étais pas chaud pour arriver dans le froid de la nuit. J’ai donc pris un départ à 20 h. J’ai passé le reste de l’après midi dans la ville et piqué une pointe à l’extérieure. Il n’y avait pas grand chose.  A part les routes principales goudronnées, le reste était des rues en terre battue. Curieusement, il faisait aussi très chaud : quasiment + 15 °C !  Bref, j’ai rejoint la gare routière en fin d’après midi et je suis parti un peu après 20 h. Contrairement à l’aller, il y avait 2 bus. Beaucoup de monde allaient à la capitale. Il y a eu également plus d’arrêts qu’à l’aller dont un pour faire le plein. Des toilettes publiques étaient aussi à disposition de l’autre côté de la route, à une centaine de mètres. Des classiques : cabanons, trou et planches pour éviter de tomber dedans. Nous avons eu un autre arrêt plus long vers 22 h à un relai restaurant. Cette fois, j’ai mangé. C’était une assiette assez copieuse de pâtes grillées avec des petits morceaux de moutons et des légumes, de quoi tenir au corps. Un jeune Mongol m’avait pris pour un Chinois et avait commencé à faire la conversation. On a très rapidement basculé à l’anglais (je ne comprenais évidemment pas le chinois…). En fait, il étudiait en Chine et y retournait dans les jours qui suivaient. Après une nuit quasi blanche (coincé entre deux mongols dans la dernière rangée du bus et le sac aux pieds, je n’ai pas dormi beaucoup), je suis arrivé à Oulan Baatar peu après 9 h 30.

 

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